CMCL19
Utopie d'une Culture Mondialisée et réalité des pratiques Communicationnelles Locales
Présentation Le colloque “Utopie d'une culture mondialisée et réalité des pratiques communicationnelles locales” a pour objectif d'explorer conjointement l'hétérogénéité des usages, des productions et des questions posées par la rencontre entre une offre technologique globalisée, souvent occidentalo-centrée et divers territoires francophones. La première édition portera sur l'Afrique Subsaharienne Francophone, territoire multiculturel, dont les contextes géopolitiques contemporains posent des questions particulièrement vives pour la recherche en communication. Ces questions intéressent principalement la communauté des sciences de l'information et de la communication, mais l'apport de chercheurs venus d'horizons culturels et disciplinaires variés permettra d'aborder cette problématique très large que constitue la communication, notamment numérique, en zone sensible, selon différentes approches complémentaires. Appel à communications Depuis près de trois décennies, les transformations des manières de communiquer et de s’informer occupent les chercheurs qui interrogent les productions et les usages liés à l’internet, l’informatique et la téléphonie mobile. Même si le rôle joué par les réseaux socionumériques dans le « Printemps arabe » a fait l’objet de nombreuses recherches, les travaux francophones qui s’intéressent à la communication combinée au développement des technologies numériques en Afrique restent rares (Kiyindou, Kouméalo & Capo Chichi 2015, Chéneau-Loquay 2012). Entre les prédictions de McLuhan sur le fameux « village global », les discours alarmistes de Paul Virilio (1993) sur les conséquences d’une accélération universelle de la communication, l’imaginaire attaché à la communication numérique semble imposer une vision qui écrase les particularités culturelles. Les approches socio-économiques ne sont pas en reste. Ainsi, longtemps focalisées sur les problèmes de fracture entre les pays économiquement développés et les autres (Le Guel 2004), les débats qui ont fait suite au rapport de la Commission McBride (1980) pour « un nouvel ordre mondial de l’information et de la communication plus juste et plus efficace », souvent désigné par l’acronyme NOMIC, révèlent un arrière-plan idéologique très universaliste. À l’inverse de ces formes d'homogénéisation des mediascapes (Appadurai 1996) qui affectent non seulement les processus étudiés, mais aussi les manières d’en rendre compte, des chercheurs ont attiré notre attention depuis longtemps déjà sur l’inventivité du quotidien, des tactiques et du braconnage (de Certeau 2003). Ces travaux doivent être mis au service d’une meilleure intelligibilité des usages de technologies de la communication, pensées comme génériques et culturellement neutres par leurs promoteurs. Mais il faut alors éviter un double écueil : l’exaltation de la créativité individuelle au détriment de la prise en compte des environnements collectifs pluriels qui informent les pratiques ; la focalisation exclusive sur ces pratiques au détriment de l’observation croisée des imaginaires (tels qu’ils se construisent sur le long terme et s’animent dans des productions médiatiques diverses, s’opposent parfois violemment entre eux et avec ceux de l’observateur) ainsi que des conditions techniques, matérielles et économiques de ces pratiques. Dans ce contexte, le colloque « Utopie d’une culture mondialisée et réalité des pratiques communicationnelles locales » a pour objectif d’explorer conjointement l’hétérogénéité des usages, des productions et des questions posées par la rencontre entre une offre technologique globalisée (Mattelart & alii 2015) souvent occidentalo-centrée et des cultures variées. La première édition portera sur l’Afrique Subsaharienne Francophone, territoire multiculturel, dont les contextes géopolitiques contemporains posent des questions particulièrement vives pour la recherche en communication. Ces questions intéressent principalement la communauté des sciences de l’information et de la communication, mais l’apport de chercheurs venus d’horizons culturels et disciplinaires variés permettra d'aborder cette problématique très large que constitue la communication, notamment numérique, en zone sensible, selon différentes approches complémentaires. Les propositions de communications pourront s’inscrire dans un ou plusieurs des axes suivants : 1. Rapports aux discours d’autoritéLes réseaux socionumériques et les messages qui circulent sur les smartphones changent-ils la relation des citoyens à l’information (Traoré 2019) qu’elle soit journalistique (Frère 2016), politique, scientifique ou encore militante ? Comment se reconfigurent les discours depuis/avec les réseaux socionumériques et les prises de parole en ligne ? Qui sont les locuteurs les plus écoutés et suivis ? Comment se construisent l’autorité énonciative et la confiance ? 2. Industries culturelles et créatives : (re)composition des mediascapesQu’il s’agisse de cinéma (Nollywood), d’applications mobiles ou encore de musique, des tensions se dessinent entre des processus d’homogénéisation et d’hétérogénéisation (Appadurai 1996), c’est-à-dire entre, d’une part, des imaginaires (sociaux, politiques, culturels) et des modèles socio-économiques globalisés et, d’autre part, leurs déclinaisons ou leurs adaptations locales (Kiyindou 2013). 3. Identités culturelles, lien social et appartenances en mobilitéLes dispositifs de communication numériques rendent possibles des formes d’interaction peu chères, immédiates et mobiles. Cela contribue-t-il à reconfigurer les formes plurielles d’appartenance et d’identité en contexte nomade, diasporique et/ou interculturel ? 4. Spécificités des langages, formes et formatsComment la communication numérique trouve-t-elle sa place dans des espaces culturels où la diversité des langues et des formes d’expression alimente la diversité des identités culturelles, où la tradition orale est très vivante, où le rapport à la culture écrite reste parfois un privilège et un outil de pouvoir entre les mains des plus aisés ? Quels dispositifs, formes et formats sont privilégiés ? À l’inverse, certaines formes de communication sont-elles choquantes, interdites, censurées ? De nouveaux langages, de nouvelles formes / normes s’inventent-ils ? 5. Enjeux épistémologiques et éthiques de l’enquête sur l’interculturalitéLes savoirs scientifiques sur la communication interculturelle peuvent répondre à des intérêts de connaissances techniques, pratiques ou encore émancipatoires, pour reprendre les catégories autrefois identifiées par Jürgen Habermas. Mais dans tous les cas, les contextes et les processus interculturels impliquent d’interroger les normes scientifiques et politiques, les cadres théoriques et sociaux, les opérations techniques et cognitives, qui contraignent à la fois l’objet observé et la posture de l’observateur (Averbeck-Lietz 2013). Finalement, la compréhension des processus de communication en situation multiculturelle ne peut faire l’économie d’une réflexion épistémologique et méthodologique renvoyant à la place du chercheur, à son implication et à ses objectifs par rapport à son enquête (Waisbord & Mellado 2014). BibliographieAppadurai, Arjun. 1996. Modernity at Large: Cultural Dimensions of Globalization, Minneapolis, University of Minnesota Press Averbeck-Lietz, Stefanie. 2013. “Pathways of intercultural communication research. How different research communities of communication scholars deal with the topic of intercultural communication”, Communications. The European Journal of Communication Research, vol. 38-3, p. 289-313. Bensaâd, Ali. 2009. « Ancrages territoriaux, réseaux sociaux et initiatives des acteurs migrants : cas des constructions des itinéraires transsahariens ». Méditerranée. Revue géographique des pays méditerranéens / Journal of Mediterranean geography, no 113 (décembre): 127-38.https://doi.org/10.4000/mediterranee.3805. Bondaz Julien. 2012. « Un fantôme sur iPhone. Apparition miraculeuse et imagerie mouride au temps du numérique », Communication & langages, n° 174, p. 3-17. https://www.cairn.info/revue-communication-et-langages1-2012-4-page-3.htm Certeau, Michel de, Luce Giard, et Michel Certeau. 2010. Arts de faire. Nouvelle éd. L’invention du quotidien, Michel de Certeau; 1. Paris: Gallimard. Chéneau-Loquay, Annie. 2012. « La téléphonie mobile dans les villes africaines. Une adaptation réussie au contexte local ». L’Espace géographique Tome 41 (1): 82-93. Frère, Marie-Soleil. 2016. Journalismes d’Afrique. Info & com. Louvain-la-Neuve: De Boeck supérieur. Gonzales, Charlotte, et Julien Dechanet. 2015. « L’essor du numérique en Afrique de l’Ouest. Entre opportunités économiques et cybermenaces », novembre, 68. Kiyindou, Alain, Kouméalo Anaté, et Alain Capo chichi, éd. 2015. Quand l’Afrique réinvente la téléphonie mobile. Collection « Études africaines ». Paris: L’Harmattan. Kiyindou, Alain. 2013. « De la diversité à la fracture créative : une autre approche de la fracture numérique ». Revue française des sciences de l’information et de la communication, no 2 (janvier).https://doi.org/10.4000/rfsic.288. Guel, Fabrice Le. 2004. « Comment pourrait-on mesurer la double fracture numérique ? » Reseaux n° 127-128 (5): 55-82. Mattelart, Tristan, Cédric Parizot, Julie Peghini, et Nadine Wanono. 2015. « Le numérique vu depuis les marges ». Journal des anthropologues. Association française des anthropologues, no 142-143 (octobre): 9-27. Scopsi, Claire. 2009. « Les sites web diasporiques : un nouveau genre médiatique ? » tic&société, no Vol. 3, n° 1-2 (décembre).https://doi.org/10.4000/ticetsociete.640. Tamokwe Piaptie, Georges Bertrand. 2013. « Les déterminants de l'accès et des usages d'internet en Afrique Subsaharienne. Analyse des données camerounaises et implications pour une politique de développement des TIC », Réseaux, n° 180, p. 95-121. https://www.cairn.info/revue-reseaux-2013-4-page-95.htm Traoré, N’gna. 2019. « Vers une gouvernance par la mosquée ». Cahiers d'études africaines n° 233 (1): 47-73. Virilio, Paul. 1993. L’art du moteur. Paris, Galilée. Waisbord, Silvio, Claudia Mellado. 2014. “De-Westernizing communication studies : A reassessment”, Communication Theory, 24(4), p. 361-372. Modalités de soumission et calendrier Les propositions de communication en français ou en anglais ne dépasseront pas 5000 signes (espaces et bibliographie non compris).
Comité d'organisation Mohamed Ait Sidi, Université Lyon 3 Comité scientifique May Abdallah, Université Libanaise, Beyrouth, Liban Ce colloque a été organisé avec le soutien de
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