Problématique

La famille est un ensemble de personnes unies par les liens de sang ou les alliances, et qui constituent un groupe. En Afrique, on n'envisage l'individu qu'en tant que membre d'une famille. « D'une manière générale (...), les liens de la parenté demeurent au premier plan » (Paulme D., 1960 :6). Chaque famille habite une concession, espace qu'il lui revient de gérer et qui englobe les grands-parents, tantes, oncles, cousins, cousines..., marquée par l'unité, la proximité des habitations et les caractères éducatifs. Une des principales missions des membres de la famille, c'est de maintenir et transmettre certaines valeurs propres au groupe, et qui en font la fierté : politesse, soumission à l'autorité parentale, discrétion, sens du partage, serviabilité. La finalité de l'éducation est le bien de la famille, les honneurs, la dignité, le respect des valeurs propres à la famille et l'estime des uns et des autres. La cohabitation dans la même concession permettait aux aînés de jouer le rôle de défenseurs des normes et valeurs et d'assurer ainsi les fonctions de socialisation et d'intégration de l'enfant. Ils jouissent d'une certaine autorité, renforcée par la présence, la relation de face à face. La communication y prend des formes précises selon la nature du lien entre les différents membres de la famille. Le non-verbal occupe une place de premier plan, à travers la gestuelle, le vestimentaire, le regard, la primauté dans la prise de parole, sa distribution...

Avec la mondialisation, l'explosion des flux de toutes sortes, se faisant plus denses, plus divers et allant de plus en plus loin (Defarges, 2005), les mouvements migratoires amènent les familles à se disperser, parfois à travers plusieurs pays. Les relations tendent à se distendre, cependant, les familles restent attachées à certaines pratiques, à la défense de certaines valeurs. Mais les distances ont limité les possibilités d'influence. L'avènement de l'internet et des réseaux sociaux, semble résoudre le problème de la distance. Les technologies « permettent différentes modalités de communication et d'interactions interindividuelles (intra et intergroupes), parce qu'elles déterminent une nouvelle représentation du temps et de l'espace, parce qu'elles induisent de nouvelles manières d'être présent à distance, ces technologies provoquent une série de représentations nouvelles et induisent un certain nombre de schémas et d'interprétation, de conduites ou d'action » (Meunier et Peraya, 2010 : 377). Si ces possibilités font craindre à D. Wolton (1998) la montée de mouvements communautaires, il n'en demeure pas moins qu'elles ont toute leur importance dans la société africaine, marquée par l'oralité. pour elle en effet, la distance devient un obstacle majeur à la communication que les technologies de l'information et de la communication peut aider à résoudre.

A travers l'application WhatsApp par exemple, il est possible, conformément à la mission qu'elle s'est assignée, d'envoyer gratuitement, via Internet, un message (texte ou vocal) à un ou plusieurs contacts, pour peu que les destinataires soient utilisateurs de l'application. Selon Wikipedia, de nos jours, la principale utilisation de WhatsApp est l'envoi de messages gratuits depuis ou vers l'étranger. C'est donc une opportunité pour les membres de familles dispersées géographiquement. Opportunité qu'a saisie la famille Sana, en créant un groupe WhatsApp, dénommée Famille SANA. Comme le précise l'administrateur du groupe, l'objectif est de rassembler la famille SANA à travers le monde. Si la plateforme met en relation les membres d'une même famille selon la définition africaine traditionnelle, il n'en demeure pas moins que la communication à travers ce groupe prend des formes nouvelles.

Méthodologie

L'objet de notre propos est de ressortir la réalité des pratiques locales à travers l'usage de WhattsApp dans la famille SANA. Il s'agit de faire une analyse sémiologique et discursive des contenus de la communication de la plateforme "Famille SANA", dont nous sommes membre. Quels contours prennent les échanges dans le groupe. Y a-t-il une relation d'autorité entre les membres, comme le veut la tradition ? Peut-on dire que la circulation de l'information se fait en fonction de cette autorité traditionnelle ? Les thèmes abordés défendent-ils des valeurs propres à la famille comme le veut la tradition ? Autant de questions auxquelles nous tentons de répondre à travers l'analyse de contenu.

Corpus

Pour bâtir notre argumentation, nous prendrons comme corpus les messages échangés entre les membres du groupe depuis sa création, sur une période d'un mois. Nous estimons qu'au bout de trente jours d'échange, les contours de la plateforme, en termes de contenus, de configuration des discours, de locuteurs les plus dynamiques, seront définitivement déterminés.